Dark-Va-Dors

Avant de valider définitivement l’intervention « Adieu Nichons », j’ai quelques examens de contrôle à effectuer.
Et oui, il faut de nouveau vérifier l’état général des nénés.
Est-ce que les petits nodules incrustés ont bougé, est-ce qu’ils se sont transformés ?
Et les nouveaux à droite, est-ce qu’ils sont dangereux ou bien juste un peu graisseux?

Ces petites questions qui peuvent sembler sans importance viennent de me pourrir l’existence.
Cela fait dix jours que j’attends avec impatience ce rendez-vous de la vérité et, je l’espère, de la délivrance.

Mes nuits ont été pourries par les insomnies et envahies de pensées pas jolies jolies.
Je suis devenue l’experte du cercueil en carton… Et oui, lorsque je m’ennuie, c’est internet qui me tient compagnie. Et puisque peut-être je vais mourir, puisqu’en ce moment bien souvent je le désire, je me dois de préparer mon avenir…

Je ne sais pas qui est responsable de mon état mais les douleurs se sont accrues, je me suis prise un coup de massue.
Est-ce mes angoisses qui sont venues me piquer les mains, les pieds, le corps tout entier? Est-ce ma tristesse qui s’est emparée de mon enveloppe abîmée?
Est-ce le manque de sommeil qui me tamponne les oreilles?

J’ai traversé ces jours et ces nuits comme un zombie épuisé par la vie.
J’ai dormi le jour, j’ai pleuré la nuit.
Mon corps et mon esprit ont été envahis par cette force obscure que je reconnais bien. Ce n’est pas la première fois qu’elle me rend visite. Chaque jour « sans », elle est là, près de moi et même en moi. Elle rôde dans sa tenue noire, elle attend un signe de faiblesse de ma part pour prendre le contrôle et me faire perdre espoir.

Je ne suis pas un cas facile, elle sait que j’ai mon style. Je suis plutôt combattante et assez résistante.
Je force mon petit corps à bouger pour lui montrer que les douleurs ne me font pas peur.
Je stimule mon moral, je lui parle en douceur. Je lui dis que je le comprends, que je l’entends mais que j’ai besoin qu’il me soutienne, qu’il m’aide à avancer.

Au bout de quelques jours qui ne valent pas de détour, je finis par sortir de mon lit, enfiler une tenue jolie et aller voir mes collègues bien en vie.
Je ne me le cache pas, cette envie soudaine est un peu motivée par mon état. J’ai envie de les voir avant qu’il ne soit trop tard, j’ai envie de les saluer, de leur dire au revoir et à plus tard.
Mais malgré ma volonté de tout donner, c’est à l’heure du déjeuner que cette force obscure me rappelle mon aventure. Je me retrouve devant ma part de flan que je n’arrive pas à couper élégamment. Mes bouts de doigts m’ont lâchée à cet instant. Je ne les sens plus, je les frotte sur mon Jean’s pour les réveiller mais en vain, il ne se passe rien.
Je suis prise de honte devant mes collègues, je me débrouille pour cacher ma gêne. J’ai envie de disparaître, je regrette d’être venue, je suis désolée de leur montrer à quel point je suis une mémé abîmée.
Qu’est-ce que je leur fais espérer? Le retour d’une femme fatiguée? La fin d’une histoire sans espoir?
Et voilà comment ce sujet me tient encore deux nuits éveillée.
C’est reparti pour l’étude chiffrée et l’analyse détaillée des cercueils éco-responsables en attendant le marchand de sable.

J’attends le week-end avec impatience, il va peut-être m’apporter un peu de légèreté et d’insouciance? Si seulement, il pouvait au moins éloigner cette force obscure…

Dark Va, Dors, je t’en supplie!

Ma grande amie, son beau mari et leur si joli petit garçon viennent à la maison. Je les sais capables de me porter, me câliner et me donner l’envie de me dépasser.
Mais lorsqu’ils arrivent, je ressemble à une endive calée dans mon canapé sans trop pouvoir bouger. Je prends de plein fouet leur regard d’amour attristé par ce que le cancer a transformé.
Malgré tout, ils ont réussi à me faire oublier quelques heures mes peurs et mes malheurs. Ils m’ont offert leur présence, leurs mots doux, ils m’ont enveloppée de tendresse et de délicatesse. Merci mes amis.

Et puis, le jour tant attendu est arrivé, le contrôle technique pas sympathique des nénés. Je suis éreintée, tendue, stressée.
Il paraît que la peur n’évite pas le danger, mais à cet instant je m’en fiche, je garde ma peur à mes côtés en me disant que si les nouvelles sont bonnes, alors je me moquerai des jours et nuits passées à m’angoisser.

Le verdict est très clair et assuré : aucune détérioration de ma situation.
Mon sein droit est toujours en l’état et le gauche n’a pas empiré.
Ils sont donc tous les deux prêts à passer à l’étape suivante.
Oui, ils sont prêts à me quitter, ils sont d’accord pour me libérer.

La force obscure tire sa révérence, elle vient de perdre face à ma délivrance.
Je la salue à mon tour et me mets au lit pour une bonne et douce nuit.

2 commentaires

  1. Hello, 

    Bon, ce qui est chiant avec les gens qui aident, c’est que souvent, ils ferment la porte à des personnes qui pourraient les aider. J en suis un peu l’exemple. Et du coup, je refuse tes invitations car je me trouve ridicule de ne rien pouvoir faire….  Ce n est pas le principe de réciprocité qui me guide, mais simplement ma gentillesse et authenticité.  À un moment donné Valérie, il faut savoir se réfugier là où des personnes te diront « viens chialer et viens rire aussi », je suis là pour toi et moi aussi.  Valérie(et suis honnête en plus, mais nulle dans certains domaines)  Envoyé depuis Yahoo Mail pour Android

    Aimé par 1 personne

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