
Trois mois sans écrire, trois mois sans user des mots pour formaliser les maux que je préfère appeler les bobos. Ce n’est pas que je n’en avais pas envie, que je n’étais pas inspirée, mais la petite grenouille que j’étais avait besoin de sortir de son bain, celui qui, petit à petit, l’ébouillantait en son sein.
Emprise par une somme d’émotions, la clairvoyance me manquait, envahie par trop d’illusions, la lucidité je perdais.
Avant d’évoquer le sujet qui me tient à coeur, un petit point santé semble de rigueur.
À cette heure, je vis avec mes douleurs qui vont et viennent sans explications. Elles sont parfois acceptables et bien trop souvent insupportables. Des traitements sont en cours, mais sans amélioration à ce jour.
Du côté du crabe, oui cette mignonnerie pour ne pas dire cancer (mieux vaut le taire), je bénéficie d’une nouvelle thérapie : mon joli petit derrière accueille chaque mois une piqûre pour lui donner la vie dure. Je supporte bien ce traitement et me sens sécurisée par ce changement.
Cela m’a permis de partir en voyage sereinement, et je peux dire qu’il a été merveilleux, incroyable, doux et partagé avec ce que j’ai de plus cher au monde, mon tendre mari et mes charmants enfants.
En parlant de ce monde, mon voyage d’été m’a reconnectée à une réalité que j’avais égarée : il est si grand, si beau, je suis si petite face à lui, une infime goutte dans un immense océan. Mais au fond, il est aussi un peu comme moi, fragile et abîmé par notre humanité.
Ces dernières semaines, j’ai perdu beaucoup d’amies de cette fameuse mignonnerie nommée le crabe par duperie. J’ai aussi appris que des amis étaient nouvellement diagnostiqués de ce même crustacé. Cela affecte mon moral sans égal, je donnerais ma vie si cela garantissait l’arrêt de cette hémorragie.
Mais lorsque je me pose, lorsque Dame lucidité accepte de me guider, lorsque des amis me demandent si je constate des évolutions de cette maladie, naturellement je réponds oui. Lorsqu’on me demande pourquoi autant de dégâts, je réponds sereinement que notre monde, si merveilleux qu’il soit, a probablement parfois fait de mauvais choix. Je ne suis pas une écolo, naturo, collapso, cancéro ou autre terme en « O ».
Je suis une femme qui constate que les progrès ont souvent à la fois du bon et du mauvais dans le temps.
La contraception, cette si belle évolution, est venue sauver des femmes autrefois et en détruit maintenant par des cancers hormonodépendants.
Les produits alimentaires transformés ont soulagé beaucoup de foyers qui devaient durement travailler il y a quelques années, et maintenant en détruit par des cancers avancés…
Ce qui nous semble beau et révolutionnaire un jour peut nous faire horreur et stupeur à une autre heure.
Je ne viens condamner quoi que ce soit, ce n’est qu’un constat d’un monde qui bouge sans cesse, qui est immense, et dont on ne mesure pas toujours les conséquences.
Il y a quelques jours, une jeune femme de 29 ans atteinte d’un cancer du sein a lancé une chaîne sur les réseaux sociaux afin d’alerter sans faire paniquer. L’idée est de montrer qu’il y a de plus en plus de cancers et qu’ils touchent des hommes et des femmes de plus en plus jeunes. J’ai aimé l’idée que j’ai trouvé libre et percutante, à l’image de nous autres combattantes.
J’ai donc pris ma petite plume sur Instagram pour témoigner de mon histoire, ma réalité par un post intitulé « JEUNE DE VIE « , donc le voici :
« En 2011, du haut de mes 36 ans, j’étais une extraterrestre dans les salles d’attentes. Avoir un cancer si jeune était une exception, une sorte d’anomalie de la vie. J’étais cette verrue au milieu des mamies.
En 2018, lors de ma récidive, du haut de mes 43 ans, je suis devenue une senior. Avoir un cancer à mon âge se rapprochait d’une norme. Je n’étais plus la plus jeune et loin d’être la seule. De verrue, je me suis transformée grain de beauté.
Aujourd’hui, en 2022, du haut de mes 48 ans, je suis une jeune mamie dans ce même endroit. Je vois tant de jeunes femmes que mon coeur se brise à chaque fois. Je ne suis même plus un grain de beauté mais une tâche de rousseur perdue parmi les autres couleurs.
Cette évolution si rapide me fait peur.
Je pense à ma fille, ma soeur, ma nièce, mes filleules.
Je pense à toutes les petites filles qui naissent dans ce monde voleur de temps.
Par ce post, je participe à la chaîne organisée par Justine afin de hurler nos maux à nos élus : notre santé doit devenir leur priorité, elle doit les inquiéter.
Alors peut-être qu’il bougent déjà? Peut-être qu’ils ont conscience de l’urgence? Si tel est le cas, dites-le moi, rassurez-moi, rassurez nos enfants pour qu’ils deviennent grands sereinement.
Emmanuel Macron ce message est pour vous évidemment.
Ma petite goutte d’eau espère rejoindre l’océan. Partagez, participez s’il vous plaît.«
Je demeure accompagnée de Dame Lucidité, j’ai conscience qu’un post, qu’un article ou qu’une petite chaîne de solidarité n’aura pas forcément l’impact escompté.
Beaucoup d’initiatives individuelles et collectives sont prises dans ce sens au sein de notre kommunauté. Elles sont plus ou moins suivies, plus ou moins comprises et même parfois plus ou moins élégantes, mais elles ont le mérite d’être là, à nos côtés, pour nous permettre de nous exprimer.
Si j’ai participé cette fois-ci, c’est parce que cela correspond à mon état d’esprit du moment, à mon cheminement : celui de ma croisade vers un avenir plus doux et donc vers un monde meilleur.
J’y crois tellement, je crois au meilleur, au plus beau, au plus doux. Si je n’y croyais pas, je ne serais déjà plus là. Oui je crois en tout cela toujours et tout le temps, c’est pour moi évident.
Toujours parfaitement écrit, je peux dans tes mots m apaiser dans des jours compliqués. Bravo
J’aimeJ’aime
Merci Maryline ♥️
J’aimeJ’aime
Mille mercis pour ce très beau court métrage s’aimer en corps.
Montrer que le cancer c’est non seulement une maladie aux traitements lourds mais aux opérations mutilantes et montrer tout le chemin possible pour vivre pleinement la vie avec ce corps modifié. Et merci pour ce billet de blog, très juste, attention et parole, ce dont nous avons besoin.
H.c.
J’aimeJ’aime
Merci bcp
J’aimeJ’aime